Voici un roman très passionnant et politiquement incorrect, et pas que pour les intégristes égyptiens; quelques passages m'ont moi-même mise un peu mise à l'aise, pourtant Dieu sait (que son nom soit exalté) qu'il en faut beaucoup.
Il s'agit d'une évocation sans concessions de la société cairote (du Caire) des années 90, entre montée de l'islamisme et du terrorisme, du refus des héritages, colonial occidental autant que communiste sous Nasser, de la corruption, de la religion, du poids des traditions les plus rétrogrades, du déchirement des êtres entre poids du passé et désir d'avenir, si j'ose dire.
Il est par ailleurs vraiment beaucoup question de sexualité, les rapports que chacun des personnages entretiennent avec la leur expliquant beaucoup d'eux-même et de leur rapport au monde: liberté voire libertinage, mensonge, lâcheté, hypocrisie, prostitution (réelle, symbolique, licite mais effective), frustration, violence ou épanouissement; le tout avec un peu d'homosexualité, de pudeur, de viols, de glorification du plaisir simple, de pédophilie, de mariages arrangés, de tabous.
Quoiqu'il advienne pour chacun des habitants, hommes, femmes, vieux, jeunes, pauvres, riches, seuls ou en famille, personne ne sort indemne de cette tranche d'observation, car l'hypocrisie règne à tous les étages de l'immeuble Yacoubian (et dans la société égyptienne); ça donne moyen envie de visiter les pyramides, mais je conseille cette lecture.
Il existe une adaptation cinématographique (un film, quoi) qui avait fait scandale à sa sortie en Egypte, je vais demander à un musulman avec qui j'entretiens une sexualité positive, épanouie et libérée de toute entrave religieuse de le télécharger illégalement un de ces jours.
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L'immeuble Yacoubian, Alla El Aswany (2004), Babel (Actes Sud), 8,50€.
Le film (pas encore vu), L'immeuble Yacoubian, un drame égyptien de Marwan Hamed.